Les sables bitumineux existent en large quantités dans le monde, au Vénézuela dans la ceinture de l’Orénoque et au Canada et en particulier dans l’Etat de l’Alberta, avant dernier état du Canada avant l’Océan Pacifique qui le borde à l’Ouest.Signalons aussi à titre historique le gisement de Pechelbronn en Alsace dont on a extrait également dans les années 1750 de l’huile extraite de sables bitumineux. Au Canada, ils ont commencé à être exploités dans les années 90/95 avant de se développer largement.
Les sables bitumineux sont un mélange de sable et d’argile à 80/85 pct, avec un peu d’eau et de10 à 15 pct de bitume.Un mélange assez éloigné du pétrole brut classique qui comprend beaucoup plus d’hydrocarbures légers. De plus ces sables bitumineux se trouvent sous la terre arable, à une profondeur de 50 à 75 mêtres. Pour l’exploiter il faut donc enlever d’abord ces 50 mêtres de terre arable pour accéder à la couche de sables bitumineux. Des techniques proches de celles utilisées dans les mines.
Une fois que l’on a accèdé à la couche de sable bitumineux, il faut séparer le bitume du sable et de l’argile ce qui se fait en l’extrayant à l’eau bouillante dans de gigantesques tambours rotatifs ou in situ en envoyant de la vapeur directement dans les gisements pour en extraire le bitume. Il n’en reste pas moins que le bitume obtenu ne ressemble que de très loin à un brut pétrolier « léger » classique quand il s’agit de le traiter dans les raffineries « traditionnelles » du monde entier.Il faut donc le transformer en quelque chose de ressemblant à du brut soit en y rajoutant les produits légers qui lui manquent soit en le transformant en un brut synthétique par action chimique sur le bitume par craquage thermique ou hydrocraquage à l’hydrogène.
Vous imaginez qu’une telle chaine de traitement est extrémement coûteuse.Un baril de brut synthétique revient à de 70 à 100 euros le baril pour un prix de vente de 110 euros. En plus son extraction consomme des quantités d’eau extaordinaire, produit des gaz à effet de serre en quantité et des d’énormes quantités de déchets. Au point que le Canada qui avait dans un premier temps signé le protocole de Kyoto s’en est finalement retiré du fait de son impossibilité d’en respecter les engagements en exploitant ses sables bitumineux.
Dans ce contexte et celui d’un prix de brut imprévisible, l’industrie pétrolière a eu quelque peine à définir et maintenir son approche. Partie bille en tête pour exploiter ces « opportunités » à une époque où le prix du brut n’arrétait pas de monter et où les perspectives de découvertes de nouveaux gisements étaient considérees moins favorables qu’elles ne le sont devenues depuis, -l’époque du peak oil- elle est revenue en arrière face aux coûts très élevés de ces exploitations et à leurs conséquences collatérales écologiques.
L’attitude du pétrolier français Total en est symptomatique. Il a annoncé en octobre 2013 sa décision finale d’investissement dans la mise en exploitation de la mine de Fort Hill pour un coût de 13 milliards de dollars et une production attendue de 180 000 barils/jours. Il est également partie prenante avec Conoco-Phillips depuis 2007 dans l’exploitation du gisement de Surmont dont la seconde phase, prévue entrer en production en 2015, amenera la production journalière du site à 200 000 barils. Par contre, il a abandonné l’année dernière le projet Voyageur, une énorme usine de conversion de bitume en brut synthétique, pour une perte comptable de1, 6 milliards de dollars et il vient d’annoncer l‘arrêt sine die des travaux d’ingénierie sur le projet d’exploitation de la mine de Joslyn du fait que ces études n’ont pas permis d’en réduire suffisamment les coûts.
Autre inconvénient de ces gisements,leurs productions n’ont qu’un débouché, l’Amérique du Nord, dont le raffinage est situé tout au sud des Etats Unis sur la golfe du Mexique où d’autres sources de brut « normal » existent en quantité. Il existe un projet de construction d’un pipeline, le Keystone XL, qui amènerait le brut synthétique canadien jusqu’au sud mais il suscite une opposition violente des écologistes américain et est soumis à l’autorisation finale de Barack Obama qui est loin d’être acquise, démocratie oblige.
D’autres projets de pipeline alternatif, de ce fait, ont vu le jour pour amener le brut à la côte et permettre son exportation vers les marchés de l’Asie du Sud Est et de la Chine.Le Canada a prévu, pour son développement, de faire passer sa production de 3,5 millions de barils à 6, en doublant la production à partir de sables bitumineux. Reste à trouver les accès au marché mondial.
Pour ce faire il existe des projets d’accroissement des capacités de transport des pîpes existants.Le Transmountain Kinder Morgan de l’Alberta vers le port de Vancouver sur le pacifique pourrait ainsi passer de 300 000 à 800 000 barils/jours.Et le pipe dit Alberta Clipper qui exporte vers les Etats Unis pourrait également passer de 450 000 à 800 000 barils/jours.
Le projet le plus important est un nouveau pipeline dit le Entbridge Northern Gateway qui relierait les gisements de sable du Nord Alberta au port de Kitimat en traversant la Colombie britannique pour alimenter les marchés chinois et asiatiques.mais il fait face à des oppositions farouches. Les ‘Natives Colombians », les locaux en quelque sorte, veulent leur part du gateaux et ont déjà obtenus des concessions significatives de la part du constructeur Entbridge.Reste à amadouer les habitants de Kirimat qui ont voté contre dans un référendum local.
Vers l’est , il existe un projet dit Energy East pour amener le brut synthétique vers les raffineries du Quebec et de la côte est mais il rencontre l’opposition des écologistes qui craignent que les travaux et la construction d’un terminal n’affecte la population déjà déclinante sur le St Laurent des baleines Beluga! C’est dire que ce n’est pas gagné alors que l’industrie pense qu’elle aura besoin de tous ces moyens d’évacuation des produits, même si en fin de compte Obama autorise la construction du Keystone XL . Elle envisage même le transport par rail de 1 million de barils/jours!