Microsoft Outlook est sur le poste de travail de l’utilisateur, un verrou important à la migration vers les logiciels libres. Un verrou à la fois technique, marketing et psychologique. Outlook, c’est un peu la messagerie doudou, celle que l’on ne peut se résoudre à jeter. Objectivement, si l’on se place dans le contexte d’une utilisation professionnelle de la messagerie, des fonctions d’agenda et de contacts, il n’y a pas grand-chose à lui reprocher. Encore moins lorsqu’Outlook est adossé à un serveur Microsoft Exchange et prend une dimension collaborative. Le combo Outlook pour le poste de travail, Outlook Web Access pour un accès nomade depuis un navigateur web et la synchronisation via ActiveSync avec les smartphones est particulièrement efficace.
Restons dans le cas d’un usage couplé d’Outlook et de Microsoft Exchange. Une récente demande de la part d’un prospect était la mise en place d’un serveur de messagerie collaborative open source couplé à Outlook pour le poste de travail. J’ai bien sûr demandé si le remplacement d’Outlook était envisageable. Le prospect n’a pas dit non, mais il souhaitait connaître l’impact pour ses employés, et si la solution alternative serait facile à adopter. Car ses employés, il ne souhaite pas les perturber avec trop de changement dans les outils informatiques qu’ils utilisent. L’ajout d’une fonction d’agenda partagé lui semblait un beau challenge.
J’ai refait un petit tour des logiciels de messagerie collaborative open source du marché pour voir où elles en étaient sur le couplage avec Outlook. Je me souviens par le passé avoir déjà souffert sur des projets de migration avec la mise en œuvre d’extensions destinées à permettre la synchronisation des agendas et des contacts.
Voici ce que j’ai pu trouver à ce jour pour les principales messageries collaboratives open source.
Bluemind propose un connecteur Outlook pour les clients disposant de la souscription professionnelle. Une fois installé, il permet d’utiliser l’agenda et les contacts de façon synchronisée avec le serveur BlueMind. Pour les emails, c’est le protocole IMAP qui assure la synchronisation.
Kolab propose plusieurs solutions selon la version d’Outlook. Tout d’abord pour les emails c’est là aussi le protocole IMAP qui est proposé. Pour les agendas et contacts, plusieurs solutions s’offrent à vous. Si vous disposez d’Outlook 2013, il est possible d’utiliser le protocole ActiveSync. Sinon, il existe un connecteur payant OutlookDAV utilisant les protocoles CalDAV et CardDAV. Un autre connecteur également payant est celui de la société Bynari.
OBM-Groupware propose OBM-Sync. Il s’agit d’un connecteur permettant de synchroniser les agendas, contacts et tâches. Les emails seront synchronisés en IMAP.
SOGo fournit un support natif de Microsoft Outlook grâce à l’utilisation du projet OpenChange développé par la société Inverse (la même que celle qui développe SOGo). Cependant si l’on prend la peine de lire la documentation, des limitations apparaissent dans le support de certaines fonctionnalités et ce ne sont pas des « détails ». Par exemple, les catégories ou les listes de diffusions des contacts ne fonctionnent pas. Le groupware proposant également les protocoles CardDAV et CalDAV, il est envisageable d’utiliser, le protocole IMAP et le connecteur payant OutlookDAV comme pour Kolab.
Zarafa propose un connecteur dans le cadre de la souscription, dont l’arrêt de la maintenance semble programmé pour mai 2016. À partir de cette date, c’est le module Z-Push qui fournit le support du protocole ActiveSync qui prendra le relais. Il est également possible de passer par les protocoles IMAP et CalDAV. Par contre, le protocole CardDAV n’est pas supporté en standard.
Zimbra propose également un connecteur Zimbra Collaboration Suite Connector for Outlook. Il gère la synchronisation des emails, agendas et contacts. À noter qu’il n’est disponible que dans l’édition professionnelle (donc payante). Si vous utilisez la version open source, il faudra mettre en œuvre les protocoles IMAP, CalDAV et CardDAV.
Il se peut que des imprécisions ou inexactitudes se soient glissées dans cette revue. N’hésitez pas à compléter/corriger en commentaire.
Premier constat : si vous voulez continuer d’utiliser Outlook, il vous faudra payer. Ceci ne représente pas forcément un surcoût selon les outils, dans la mesure où, pour une entreprise, prendre un contrat de souscription pour disposer d’un support (et donc des connecteurs) est une pratique courante, voir, fortement recommandée.
Cependant, la question de la fiabilité de ces connecteurs introduit toujours un doute dans l’esprit du futur utilisateur. Un doute qu’il n’est pas facile de lever. Les retours d’expérience ne sont pas légion sur le web et il faut souvent se contenter de l’affirmation de l’intégrateur ou de l’éditeur.
À titre personnel, je reste méfiant et je préfère tenir un discours assez clair à mes prospects et clients. Si vous voulez utiliser Outlook, sachez que cela implique un coût pour une couverture fonctionnelle qui ne sera pas 100 % de celle du couple Outlook plus Exchange. Attendez-vous à de possibles désagréments. De plus, je trouve qu’Outlook lorsqu’il fonctionne avec le protocole IMAP perd en ergonomie et peut également dérouter l’utilisateur habitué à un fonctionnement avec le protocole POP3 par exemple ou Exchange.
Passé cet avertissement, je reste convaincu que l’utilisation d’une messagerie collaborative open source implique de renoncer à Outlook. Il faut basculer à Thunderbird et son extension d’agenda Lightning avec la mise en œuvre de protocoles standards et ouverts comme IMAP, CalDAV et CardDAV.
Une autre approche possible est de n’utiliser que les clients web qui ont fortement progressé en terme d’ergonomie. Certains clients web comme celui de BlueMind fonctionnent également en mode déconnecté. Le smartphone ou la tablette jouent alors le rôle de complément lorsque l’on est en mode déconnecté. Une autre alternative pour le poste de travail est la version Windows de Kontact sur laquelle je vous ferais un retour prochainement.
Le saviez-vous ?
Le protocole CalDAV offre une synchronisation bidirectionnelle des rendez-vous d’un agenda ou des tâches associées. À noter que la gestion des disponibilités pour l’organisation des rendez-vous ne fait pas partie des fonctionnalités de ce protocole. Pour obtenir cette fonctionnalité, il faut mettre en œuvre des mécanismes complémentaires pour accéder aux disponibilités des personnes que vous souhaitez inviter. L’accès à leur calendrier au format iCalendar est une solution par exemple, mais sa mise en œuvre concrète peut poser pas mal de difficultés.