Décidemment, ça ne me parait pas s’améliorer dans l’équipe de France du nucléaire.Il fut un temps où nous étions, ou faisions semblant de croire, que nous étions les dieux du nucléaire, les seuls les vrais, ceux qui allaient couvrir le monde de nos EPR, traiter les combustibles usés des centrales des grands pays développés et qui allions peu à peu, devenir le producteur/distributeur de l’Europe.
Quelques années plus tard, force est de constater que la situation est bien moins brillante que nous ne l’espérions. La faute à la catastrophe de Fukushima, bien sur, qui a été suivie de l’abandon du nucléaire en Allemagne, du retrait du même nucléaire du Japon, notre meilleur client en retraitement et fourniture de combustible, même si ça commence à reprendre avec le redémarrage des deux réacteurs de la centrale de Sendai. Mais aussi à nous même avec l’aventure de l’EPR dont les résultats sont de de plus en plus discutables.
Celui de Finlande dont Areva avait pensé qu’il pourrait faire passer la société de concepteur du réacteur et fournisseur de certains de ses équipements à producteur et installateur de la centrale nucléaire complète, va au contraire conduire Areva à la quasi faillite d’abord, au démantèlement ensuite au profit, discutable d’alleurs d’EDF, dont on ne sait même plus s’il est capable de fournir un couvercle de la cocotte fiable. Un Areva réduit à la Hague et à l’ancien Framatome au Creusot, à un domaine minier discutable et à 15 pct de la filiale d’EDF qui vendra les EPR futurs. S’il y en a, car on s’est âperçu que le réacteur de 1600 MW ne correspondait pas vraiment à la demande du marché !
Celui de Flamanville ne va guère mieux qui est désormais prévui démarrer avec 4 ans de retard et avec un prix de revient de 10,5 milliards d’euros soit plus du douible que prévu initialement. Et encore s’il ne faut pas finalement, changer le couvercle du réacteur.
Les deux vendus à la Chine pour la centrale de Taishan vont bien, merci pour eux et merci aux chinois qui ont su battre le record de vitesse de construction de centrale nucléaire dans le monde pour que le premier EPR opérationnel au monde se trouve en Chine, opéré par des opérateurs chinois:! Un réacteur dont le premier est apparemment un vrai EPR mais donc le second a été largement sinisé.Et le tout leur a servi de modèle pour concevoir et construire leur propre modéle d’EPR de 3ème génération baptisé « Hualong », que nous allons retrouver face au notre….pour les appels d’offre d’EDF Energy, la filiale anglaise d’EDF.Nous le trouverons aussi sans aucun doute dans les 25 projets de centrale nucléaire en cours de construction en Chine et pour lesquels Areva a abandonné tout espoir.
N’oublions pas au passage le vrai concurrent de l’EPR, le modèle AP 1000 de Westinghouse/Toshiba, que les chinois ont également acheté et très probablement sinisé.
Hualong en effet est un réacteur de 1100 MW sur lequel nous n’aurons aucun droit et que les chinois pourront offrir pour les projets de centrale nucléaire « actuels » qui tournent autour de réacteurs de 1000/1100 MW. On pourrait même le trouver pour le projet de centrale anglaise de Bradwell, sur terrain d’EDF Energy, face aux modèles équivalents du russe Rosatom ou de l’Atmea. développé par ENGIE avec Mitsubishi.
Last but not the least, nous avons signé récemment, lors de la visite du Premier Ministre Chinois,Li Keqiang,une » Déclaration conjointe sur l’approfondissement de la coopération franco-chinoise sur l’énergie nucléaire civile » qui prévoit diverses mesures de « bouchage de trous » par les chinois dans la gruyère du dispositif français, à savoir, une prise de participation dans Areva NP, l’ex filiale réacteur en passe de cession à EDF, une prise de participation chinoise à l’Areva « restant » récentré sur le cycle du combustible ( La Hague) et une participation chinoise à un projet minièr commun.
Pour en terminer avec le positionnement d’EDF Energy, il n’est pas impossible, maintenant que notre filière France est toute nue et sans argent, qu’EDF essaye, en contrepartie d’un ticket d’entrée de 20 pct chacun dans le projet d’Hinkley Point à 16 milliards de Livres pour les deux opérateurs chinois CGN et CNNC contre une aide précieuse pour obtenir l’homogation du réacteur Hualong par les autorités britanniques
La boucle sera ainsi bouclée. Grace à la gestion aventureuse de la filière nucléaire française et en particulier à celle de Madame Lauvergeon chez Areva, nous serons passé en quelques années d’une positionnement de leader technique mondial du nucléaire civil à celui de premier distributeur européen d’electricité en partenariat avec les opérateurs chinois et de distributeur des produits chinois.
Pas très glorieux, non ?