Tous les lundis après-midi, ma môman, qui est un être exceptionnel et ceux qui la connaissent ne me démentiront pas… ma môman donc, « excursionne » avec son groupe de chinchins. « Chinchins », un nom qui est venu comme ça, entre eux. Ils auraient pu choisir « joyeux marcheurs », ils ont choisi « chinchins ».
Souvent, le mardi midi, je vais déjeuner chez elle. Du coup, elle me raconte sa sortie. Et souvent, elle est agacée et a envie de laisser tomber. Il faut dire que ce qui occupe les conversations, ce sont « les assistés » et la Marine. De ce que j’en ai compris, beaucoup de chinchins trouvent qu’on aide trop les étrangers, qu’il y a un tas de faignants qui profitent du système et qu’on devrait les mettre au boulot : « Parasites, un p’tit coup de pompe dans l’arrière-train, ça ne serait pas du luxe ! ». Forcément, ma môman, ce type de discours, ça la gonfle. Dans le groupe de chinchins, il y en a un qui se prénomme Aziz… Je me demande comment il doit ressentir ces conversations récurrentes. Apparemment, il rigole. Aziz, il va aux chinchins parce qu’il peut boire son pastis tranquilou.
Sauf que…
Les chinchins sont tous aveugles. Ils sont largement « subventionnés » par l’état. Ils râlent qu’on ne les aide pas assez, qu’il n’y a pas assez de spectacles pour eux, qu’on les bouscule dans le tram. Dès qu’ils veulent déménager, des associations s’occupent de tout, même quand c’est tous les trois mois. Et ils votent FN.
Ce qui me parait le plus mesquin dans l’histoire, c’est que ces chinchins ont souvent des revenus supérieurs, toutes aides confondues, à leurs accompagnants, ils ne paient pas ou peu d’impôts, mais qu’ils refusent de participer aux frais d’essence des z’automobiles de ceux qui les baladent dans le Pilat ou dans les Monts de la Madeleine. Comprenez : « ils z’ont bien du malheur, alors on leur doit le bénévolat ».
Des fois, l’humanité me laisse pantoise et pantelante. En tout cas, j’admire ma môman de sa patience. Parce que moi, je leur couperais la langue.