La Commission européenne a adressé récemment une mise en demeure à la France afin qu’elle lance, sans plus tarder, le processus de mise en concurrence des concessions hydroélectriques françaises, en gestation depuis 2008.
L’Europe, dans sa grande bienveillance, exige la privatisation de ces barrages, pour l’essentiel construits par nos aînés et financés par les impôts de nos parents et grands-parents…
En juillet 2008, le ministre de l’Ecologie, Jean-Louis Borloo, signait le décret de mise en concurrence des concessions des barrages hydroélectriques français.
EDF bénéficiait jusqu’à cette date d’un droit de préférence sur le renouvellement des concessions mais avec la transformation de l’électricien en société anonyme en 2004, et le vote en 2006 (à la demande de la Commission européenne) d’un amendement abrogeant ce droit de préférence, le renouvellement des concessions a été ouvert à la concurrence «libre et non faussée»…
Les premiers appels d’offres pour le renouvellement des concessions devaient être ouverts fin 2010 mais ce dossier est resté jusqu’ici bloqué par la France, au grand dam des commissaires européens.
La Commission européenne agit donc au titre de l’article 106 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) : « En vertu de l’article 106 du TFUE, les Etats membres sont tenus de veiller, en ce qui concerne les entreprises publiques et les entreprises auxquelles ils accordent des droits spéciaux ou exclusifs, à n’édicter et à ne maintenir aucune mesure contraire aux règles des traités, et notamment aux règles de concurrence ».
« L’envoi d’une lettre de mise en demeure ne préjuge pas de la conclusion finale de la procédure. Par contre, la procédure crée une structure claire pour que la Commission puisse à présent entamer un dialogue actif avec les autorités françaises à ce sujet », a indiqué le porte-parole de la Commission.
Prenant les devants, la ministre de l’Ecologie, Ségolène Royal, a précisé que les premiers appels d’offres pour sélectionner les actionnaires seront lancés dès 2016. La loi de transition énergétique d’août 2015 fixe en effet un nouveau dispositif d’ouverture des concessions et prévoit le regroupement des barrages par grandes vallées (barycentres) et la création de sociétés d’économie mixte, afin d’essayer de limiter la privatisation des ouvrages.
Vendre les barrages hydroélectriques, c’est se priver de la seule source d’électricité décarbonée
Le Conseil national de la Résistance (CNR), crée par Jean Moulin le 27 mai 1943 à Paris, réunissait dans le même combat de libération nationale les communistes et les gaullistes dans une volonté de recouvrer la souveraineté nationale et populaire. C’est dans ce cadre que les barrages hydrauliques furent construits.
Cette volonté a permis un essor économique sans précédent, la France se hissant au rang de 4ème puissance économique mondiale.
Aujourd’hui, EDF reste le premier producteur d’électricité d’origine hydraulique de l’Union européenne, avec plus de 20 000 MW de puissance installée en France. La France compte 399 barrages sous concession. Environ 80% d’entre eux sont exploités par EDF, 12% par Suez via ses filiales Société hydro électrique du midi (Shem) et Compagnie nationale du Rhône (CNR), le reste étant aux mains de petits exploitants.
L’hydraulique représente 12% de la production totale d’électricité française. Respectueuse de l’environnement, l’hydroélectricité ne participe pas à l’augmentation de l’effet de serre ni à la pollution de l’air, n’émettant ni CO2, ni gaz polluants.
La première escroquerie est de transférer les gains d’une infrastructure, financée par les impôts des citoyens français, à des sociétés privées qui vont vite faire de la rapine légalisée, exactement comme c’est le cas pour les péages d’autoroutes.
La deuxième escroquerie évidente, c’est qu’au moment même où François Hollande, avec l’agenda de la COP 21, désire taxer fortement les émissions de carbone, la valeur de l’énergie «décarbonée» va finir par faire des bonds si on la laisse aux mains d’entreprises privées comme ce fut le cas en Californie avec l’entreprise Enron de sinistre mémoire…
Le mandat de Nicolas Sarkozy a servi à détruire une partie de ce que le CNR avait mis en place à la libération. On pouvait penser ensuite que François Hollande, « l’ennemi de la finance » aurait à cœur de revenir aux fondamentaux et de préserver ce patrimoine commun. Mais la trahison continue et la vente à la découpe de notre pays se poursuit conformément aux diktats de la commission européenne et des lobbys investisseurs…