Chaque État membre dispose d’un certain nombre de voix accordées en fonction de sa population (à la louche). La majorité qualifiée est atteinte si elle réunit 50 % des États membres (14 sur 28) représentant au minimum 260 voix sur 352 et 62 % de la population totale de l’Union. Autrement dit, la minorité de blocage est atteinte avec 92 voix ou avec une coalition de pays représentant plus de 38 % de la population totale de l’Union.
La pondération actuelle des voix est la suivante :
Allemagne, France, Italie, Grande-Bretagne : 29 voix chacune
Espagne et Pologne : 27 voix chacune
Roumanie : 14 voix
Pays-Bas : 13 voix
Belgique, République Tchèque, Grèce, Hongrie, Portugal : 12 voix chacun
Bulgarie, Autriche, Suède : 10 voix chacune
Croatie, Danemark, Irlande, Lituanie, Slovaquie, Finlande : 7 voix chacun
Estonie, Lettonie, Luxembourg, Chypre, Slovénie : 4 voix chacun
Malte : 3 voix
Aux dernières nouvelles, outre la Grande-Bretagne, la Suède, les Pays-Bas, le Danemark, la Hongrie seraient prêts à voter contre Juncker. Soit 71 voix sûres. Les trois Baltes, 15 voix, hésiteraient : soit 86 voix. Si la Finlande bascule, comme le prétendent certains, la minorité de blocage serait atteinte. Elle peut aussi l’être si la Grande-Bretagne réunit 38 % de la population (mais, là, il faudrait que la France, l’Italie et l’Espagne ou la Pologne changent de camp…).
Ce système va être remplacé, le 1er novembre prochain, par une règle plus simple qui rendra plus difficiles les blocages : la majorité qualifiée sera atteinte avec 55% des Etats (soit 16 pays sur 28) représentant 65 % de la population (325 millions de personnes). La minorité de blocage sera atteinte avec plus de 45 % des pays (13 États) ou plus de 35 % de la population représentant au moins 4 pays (pour éviter que l’Allemagne et deux autres pays puissent parvenir seuls à ce seuil), soit 175 millions de personnes.
Reste à savoir si Berlin, l’arbitre des élégances européennes, est prête à passer au vote et donc à isoler Londres. Après avoir rappelé, lundi, que la désignation du président de la Commission se ferait à la majorité qualifiée, la chancelière allemande a semblé reculer, hier, dans un discours devant le Bundestag : « je ne partage pas les réticences (de David Cameron), mais je dis aussi clairement que je considère comme grossièrement irresponsable et en fait inacceptable la nonchalance avec laquelle certains disent qu’il importe peu que la Grande-Bretagne approuve ou n’approuve pas (Jean-Claude Juncker), voire que la Grande-Bretagne reste ou pas un membre de l’Union européenne : c’est tout sauf indifférent ou mineur ». En même temps, la probable adhésion du parti anti-euro Alternativ für Deutschland (AfD) au groupe eurosceptique des conservateurs britanniques pourrait tendre un peu plus les relations entre les deux dirigeants. Reste que, selon un diplomate français, personne n’envisage de gaité de cœur d’isoler le Royaume-Uni et de déclencher une crise politique. Mais en même temps, tout le monde veut éviter un choc de légitimité entre le Conseil européen (l’Europe des États) et le Parlement européen (l’Europe des peuples). Il faut donc trouver un compromis dont personne ne sorte perdant. Mais Londres et les eurodéputés ayant placé la barre très haut, on se demande quel compromis pourrait être acceptable par les deux parties…