« Le plus grand don de n’importe quel homme d’État n’est pas de savoir quelles concessions faire, mais de reconnaître quand les faire. » (Metternich).
Il y a exactement deux siècles, le 9 juin 1815, au château de Schönbrunn, fut signé l’Acte final du Congrès de Vienne, cent vingt et un articles rédigés en trois cents feuillets qui concluent le très long Congrès de Vienne, paraphé sans attendre la défaite définitive de Napoléon. Le traité commençait très pompeusement : « Au nom de la Très-Sainte et Inviolable Trinité ». Cette conférence internationale avait débuté officieusement le 18 septembre 1814 et officiellement le 1er novembre 1814 et les discussions ont duré près de neuf mois !
Ce traité a figé l’Europe pour un siècle jusqu’au Traité de Versailles signé le 28 juin 1919, à l’exception des quelques modifications en 1830, 1848, 1861 et 1870 qui ne remirent pas en cause l’équilibre général de Vienne.
Il faut imaginer ce Congrès de Vienne comme un Sommet européen, à la différence essentielle que les gouvernements (à une ou deux exceptions près) n’étaient pas démocratiques et que les grands pays décidaient pour les petits (au point parfois de les absorber). Il faut aussi imaginer l’ambiance festive qui n’avait rien à voir avec les marathons diplomatiques d’aujourd’hui où les négociations se poursuivent en pleine nuit (l’idée actuelle étant que l’accord surgit par épuisement des parties !).
À Vienne, la diplomatie festoyait dans des soirées mondaines avec plusieurs centaines de princes et de représentants de divers groupes de pression. Vienne était une capitale centrale de la culture européenne. Il faut ainsi se rappeler par exemple que ce fut à Vienne que fut créée le 8 décembre 1813 la 7e Symphonie de Beethoven (composée entre 1811 et 1812).
L’idée générale fut que les puissances européennes soldaient définitivement l’épopée napoléonienne qui a mis le continent à feu et à sang. Mais l’épopée napoléonienne a aussi introduit le code civil, et les idées de liberté et de nation. En pleines négociations, Napoléon Ier s’est payé le luxe de tenter un retour avec les Cent-Jours, ce qui n’améliora pas l’image de la France à Vienne. Heureusement, mandaté par le roi Louis XVIII, Talleyrand réussit à intégrer la France dans le club très fermé des puissances influentes (la Russie, le Royaume-Uni, la Prusse et l’Autriche) un peu à l’instar de De Gaulle qui était parvenu en 1945 à faire partie des pays victorieux aux côtés de Churchill, Roosevelt et Staline. Vienne en 1815, ce fut Versailles en 1919 ou Yalta en 1945.
La future Sainte-Alliance
Pour faire face aux invasions de Napoléon, la Prusse (royaume), la Russie (empire), l’Autriche (empire) et le Royaume-Uni (royaume) se sont alliés dès 1812 (Sixième Coalition) contre la France, ce qui préfigura la Sainte-Alliance officiellement formée le 26 septembre 1815 (sans le Royaume-Uni). La capitale française fut vaincue le 31 mars 1814, Napoléon a alors abdiqué (Traité de Fontainebleau signé le 11 avril 1814) et s’est exilé le 4 mai 1814 sur l’île d’Elbe tandis que le Sénat français, le 3 avril 1814, a proclamé roi de France Louis XVIII, le comte de Provence et frère de Louis XVI.
Le Traité de Paris du 30 mai 1814 a décidé du sort des nouvelles frontières de la France qui est revenue à la situation du 1er janvier 1792 plus une partie de la Savoie (Chambéry et Annecy), Mulhouse (qui était suisse), Montbéliard, Avignon et le Comtat venaissin, Landau, une partie de la Sarre, mais sans Rhénanie (Victor Hugo évoqua la perte immense de ce territoire pour les Français). La Martinique, la Guadeloupe et La Réunion furent rétrocédées à la France, ainsi que Saint-Louis du Sénégal (ce qui conduisit à l’épisode malheureux du Radeau de la Méduse le 2 juillet 1816 immortalisé par Géricault). Ce traité n’a pas réglé le sort des autres pays européens et a donc prévu une grande conférence internationale pour le régler à Vienne.
Petit aparté : Napoléon avait obtenu la souveraineté de l’île d’Elbe (37 000 habitants) et ne se reposa sur cette principauté : il fit construire des infrastructures (des routes, des ponts, des fortifications, des canaux d’irrigation pour les cultures, un hôpital), dynamisa l’économie de l’île en créant de nouvelles activités et en renforçant l’emploi (plantation d’oliviers, de mûriers, de pommes de terre, de vignes, etc.), organisa des services pour éliminer les ordures, etc. Très entreprenant, Napoléon était un organisateur de collectivité exceptionnel dont la mégalomanie l’a perdu et a perdu aussi la France et l’Europe.
Les principaux acteurs
Revenons à Vienne où la langue d’usage fut alors le français. Parmi les nombreux diplomates qui se côtoyèrent pendant toute la durée du Congrès de Vienne, les plus importants furent l’Autrichien Metternich, le maître de cérémonie, les Britanniques Wellington et Castlereagh, le Prussien Hardenberg et le Russe Alexandre Ier.
Klemens von Metternich-Winneburg (1773-1859), soucieux de préserver la puissance autrichienne en Italie et plus généralement l’Ancien Régime en Europe, ami de Talleyrand, assez hostile à la Russie, voulait réduire au maximum l’esprit de revanche contre la France où il fut ambassadeur d’Autriche de 1806 à 1809. Il fut le Ministre autrichien des Affaires étrangères du 8 octobre 1809 au 13 mars 1848 (et futur Chancelier autrichien du 24 mai 1831 au 13 mars 1848). Par son intelligence d’esprit, il fut sans doute l’homme le plus influent d’Europe entre 1815 et 1848.
Arthur Wellesley, duc de Wellington (1769-1852), militaire et ambassadeur du Royaume-Uni en France, quitta Vienne pour la Belgique lors des Cent-Jours pour devenir le futur vainqueur de Napoléon à Waterloo. Frère de Richard Wellesley qui fut le Ministre britannique des Affaires étrangères du 6 décembre 1809 au 4 mars 1812, il était partisan de préserver à la France sa place en Europe pour veiller à l’équilibre européen. Il fut par la suite Premier Ministre britannique du 22 janvier 1828 au 16 novembre 1830 et du 14 novembre 1834 au 12 décembre 1834.
Robert Steward, vicomte Castlereagh (1769-1822) fut Ministre britannique des Affaires étrangères du 4 mars 1812 au 12 août 1822 et s’opposa à la politique réactionnaire de la Sainte-Alliance prônée par Alexandre Ier, ce qui l’incita à préserver l’équilibre des puissances européennes en y incluant la France.
Karl August von Hardenberg (1750-1822) fut Chancelier du Royaume de Prusse du 4 juin 1810 au 26 novembre 1822. À la tête de la délégation prussienne, anciennement détesté par Napoléon, il fut un allié d’Alexandre Ier mais fut concurrencé par l’influence de Metternich auprès des autres diplomates. Il échoua à faire annexer la Saxe par la Prusse et aussi (après Waterloo), à démembrer la France.
Le tsar Alexandre Ier (1777-1825) a pris lui-même la tête de la délégation russe. Empereur de Russie depuis le 23 mars 1801 (jusqu’à sa mort le 1er décembre 1825), Alexandre Ier combattit la France napoléonienne, l’Empire ottoman et la Suède. Grâce à lui et à ses acquisitions, la Russie devint une grande puissance européenne qui fut à l’origine de la Sainte-Alliance (Alexandre Ier était à la tête de la Sixième Coalition) pour réprimer tous les mouvements révolutionnaires. Installé chez Talleyrand à Paris juste après la défaite française en 1814, Alexandre Ier fut séduit par la vie parisienne et les Français ont vu en lui un homme courtois et sympathique. Installé ensuite à l’Élysée juste après Waterloo, il s’est opposé aux volontés de la Prusse de démembrer la France (refus de lui concéder l’Alsace et la Flandre).
Et Talleyrand
En principe, la France n’avait plus son mot à dire sur le sujet. Pourtant, Talleyrand (1754-1838), évêque d’Autun, a réussi à s’imposer et à imposer la France dans les négociations. Il était alors Ministre des Affaires étrangères depuis le 13 mai 1814 (jusqu’au 30 mars 1815, date du retour de Napoléon). Il avait ces mêmes responsabilités sous Napoléon du 22 novembre 1799 au 9 août 1807 et avait présidé brièvement le gouvernement du 3 au 14 avril 1814 avant de le refaire du 9 juillet 1815 au 26 septembre 1815. Par la suite, il avait toujours cru que Louis XVIII le rappellerait à la tête du gouvernement, ce qui ne fut pas le cas. Mais revenons à Vienne.
Talleyrand avait réussi à convaincre ses interlocuteurs qu’ils s’étaient opposés à Napoléon mais que Napoléon n’était plus la France et que la monarchie avait été restaurée. Louis XVIII était donc le garant de l’ordre européen que souhaitait également la Sainte-Alliance. Il a réussi également à faire participer l’Espagne, le Portugal et la Suède aux discussions informelles (les seules qui vaillent puisqu’il n’y a eu que très peu de réunions formelles, elles n’étaient que mondaines et sans intérêt diplomatique). Talleyrand voulait également rassembler les petits pays européens autour de la France. De fait, Talleyrand est parvenu à son objectif de rompre l’isolement diplomatique de la France et à cette période, ce fut un exploit assez extraordinaire. Ses autres objectifs étaient notamment d’éviter une trop grande expansion de la Prusse, il n’y est parvenu qu’à moitié, et l’autonomie de la Pologne, ce fut là un échec.
Exploit d’autant plus grand que le 26 février 1815, Napoléon quitta l’île d’Elbe et remonta vers Paris (la fameuse « route Napoléon » en passant par Grenoble et Montereau), et reprit le pouvoir du 20 mars 1815 au 8 juillet 1815 (ce furent les Cent-Jours). Son but était d’éviter un exil plus lointain et surtout, de casser les conclusions du Congrès de Vienne, qui furent malgré tout validées le 9 juin 1815 et confirmées le 18 juin 1815 avec la défaite définitive de Napoléon à Waterloo. Là aussi, la ténacité de Napoléon capable de reprendre le dessus face à une coalition européenne fut exceptionnelle même si ce ne fut pas de longue durée. Napoléon abdiqua une seconde fois le 22 juin 1815 et fut mis définitivement hors de portée des affaires de l’Europe en quittant Rochefort le 15 juillet 1815 pour l’île Sainte-Hélène. Le second Traité de Paris signé le 20 novembre 1815 fut alors beaucoup plus restrictif pour la France par rapport au premier Traité de Paris du 30 mai 1814 : la France a perdu Monaco, Nice, la Savoie, Sarrebruck, Sarrelouis, Landau, etc. pour se retrouver dans ses frontières de 1790.
Conclusions du Congrès de Vienne
Parmi les clivages à Vienne, il y avait les puissances qui voulaient préserver un certain équilibre européen (et donc, qui soutenaient le maintien de la France en tant que telle), avec l’Autriche et le Royaume-Uni, et il y avait les puissances expansionnistes voulant profiter de cette gigantesque mise à plat pour annexer de nouveaux territoires, ce furent la Prusse et la Russie. La Russie voudrait notamment se rapprocher du centre de l’Europe avec l’annexion de la Pologne et avoir une ouverture vers la Méditerranée en annexant des territoires ottomans. Pour maintenir sa suprématie maritime, le Royaume-Uni voulait limiter au maximum l’expansionnisme russe notamment en favorisant la puissance de la Prusse en Europe centrale. Quant à elle, l’Autriche voulait éviter au maximum cette influence prussienne dans les États allemands en lui refusant l’annexion de la Saxe. La France aussi était bien sûr défavorable à l’annexion de la Saxe par la Prusse et voyait déjà en elle le futur ennemi de 1870.
Au final, les frontières de l’Europe furent redessinées au mépris de l’aspiration des peuples à la liberté (la Belgique, la Pologne, les nations des Balkans furent ignorées), selon les principes du conservatisme, de la légitimité et de la restauration monarchique. Le nationalisme italien fut également nié par la mise de la Lombardie sous influence autrichienne (l’unité italienne n’a eu lieu que le 17 mars 1861 et l’unité allemande le 18 janvier 1871) : « Au lieu de la liberté promise, les nations européennes se sont trouvées opprimées. Les prisons du Piémont, de Sardaigne, de Naples et en général, toutes celles d’Italie et d’Allemagne regorgent de citoyen enchaînés. (…) Voilà les événements qui ont éclairé l’esprit des peuples et leur ont fait réaliser qu’il n’était plus possible de faire confiance aux souverains. » (Pierre Kakhovski, « The first Russia Revolution »).
Une légère modernisation a fait supprimer l’existence du très archaïque Saint-Empire Romain Germanique (la continuation de l’Empire de Charlemagne lui-même héritier très théorique de l’Empire romain d’occident) au profit d’une Confédération Germanique de trente-neuf États allemands souverains : « Le but de cette Confédération est le maintien de la sûreté extérieure et intérieure de l’Allemagne, de l’indépendance e de l’inviolabilité des États Confédérés. » (article 54). Son fonctionnement fut précisé dans les articles 55, 56 et 58 : « Les Membres de la Confédération, comme tels, sont égaux en droits ; ils s’obligent tous également à maintenir l’Acte qui constitue leu union. Les affaires de la Confédération seront confiées à une Diète fédérative, dans laquelle tous les membres voteront par leur plénipotentiaires (…). L’Autriche présidera la Diète fédérative. Chaque État de la Confédération a le droit de faire des propositions, et celui qui préside est tenu de les mettre en délibération (…). ». Le siège de cette Diète fut fixé à Francfort et son ouverture au 1erseptembre 1815.
Parmi ces États confédérés, il y avait principalement les cinq royaumes germaniques (la Prusse, la Saxe, la Bavière, le Wurtemberg et le Hanovre) et la partie germanique de l’Autriche. En comparaison, en 1792, le Saint-Empire Romain Germanique était composé de trois cent cinquante États ! On ne s’étonnera donc pas de la tradition décentralisée et fédérale de l’Allemagne actuelle au contraire du centralisme français multiséculaire.
Si la Prusse n’est pas parvenue à acquérir la Saxe, elle a pu annexer la Rhénanie et la Westphalie, et cette expansion occidentale l’a rendue voisine de la France (qui conserva l’Alsace). En échange de la Belgique, l’Autriche a pu étendre son influence dans le nord de l’Italie (Lombardie, Vénétie, Tyrol), à Salzbourg, en Galicie, en Dalmatie (l’actuelle Croatie) et dans d’autres pays des Balkans (au détriment de l’Empire ottoman). La Russie a obtenu la Bessarabie au sud (conquise en 1812), la Finlande au nord (conquise en 1809) et surtout la plus grande partie de la Pologne, l’Ukraine polonaise, la Lituanie et la Biélorussie au centre (Alexandre Ier est devenu roi de Pologne en 1815 et concéda aux Polonais une charte constitutionnelle en novembre 1815).
Le Royaume-Uni se contenta de maintenir sa suprématie maritime en acquérant de nouvelles bases maritimes (Malte, îles Ioniennes, Helgoland, Le Cap, Ceylan, île Maurice, la Guyane, Tobago et Sainte-Lucie) et de rétablir les rois de ses alliés portugais et espagnols. Les Britanniques trouvèrent leur compte également en pérennisant l’intégration d’Anvers et de son port aux Pays-Bas (le risque pour eux restant une possible annexion française) et en transformant Hanovre en un véritable royaume (allié de la Grande-Bretagne).
La Suède a acquis la Norvège du Danemark mais a dû céder la Poméranie à la Prusse. La Pologne a été dépecée une nouvelle fois, et au-delà du principal bénéficiaire, l’Empire russe, la Prusse garda sa partie orientale avec Dantzig et Thorn et la Posnanie, tandis que l’Autriche gagna la Lodomérie (au sud de la Vistule) et la Galicie. Seule, la ville de Cracovie a sauvé son indépendance en devenant une cité république.
Par ailleurs, pour circonscrire tout nouvel expansionnisme français, la France fut mise en « sandwich » entre trois États tampons renforcés : le Royaume uni des Pays-Bas (comprenant l’actuel Benelux) ; la Confédération Helvétique (Suisse) qui fut reconstituée en intégrant Genève, Neuchâtel, Bâle, Valais et dont la neutralité fut garantie par le traité ; et enfin, le Royaume du Piémont-Sardaigne qui a annexé la Savoie devenue neutre comme la Suisse. Les frontières de la France sont revenues à celles de 1790. Les Pays-Bas avaient acquis le Luxembourg en échange des villes de Fulda et Nassau laissées aux États allemands. Les deux tiers du territoire français furent placés sous occupation étrangère jusqu’en 1818, data à laquelle la France de Louis XVIII a rejoint la Sainte-Alliance.
À la fin du traité, souhaités par les Britanniques, quelques articles ont abordé d’autres questions que territoriales, comme l’abolition de l’esclavage (Déclaration du 8 février 1815) et la libre circulation des navires sur les fleuves traversant plusieurs États (comme le Rhin, la Moselle et la Meuse). Talleyrand inspira également le Règlement de Vienne du 19 mars 1815 (« sur le rang entre les agents diplomatiques ») qui fut complété par le Congrès d’Aix-la-Chapelle en 1818 et qui resta en vigueur jusqu’en 1961.
Deux siècles pour construire une paix européenne durable
Un noble prussien, Jean-Baptiste Cloots, à la tête d’une délégation d’Européens favorables aux idées de la Révolution française, se présenta le 19 juin 1790 à l’Assemblée Nationale en prédisant : « L’univers formera un seul État, l’État des individus-unis ! ». Pourtant, vingt-cinq ans plus tard, sur les ruines napoléoniennes, l’Ancien Régime a gagné la partie à Vienne.
La configuration européenne du Congrès de Vienne ne pouvait pas satisfaire durablement les peuples européens car elle s’opposait à l’esprit de la Révolution française et aux Lumières, et aussi aux nationalismes qui se développèrent en 1830 (Grèce, Belgique), et en 1848 puis qui furent rapidement et durement réprimés par la force. Puis, ce fut 1870, 1914-1918 et 1939-1945, l’Europe plongée dans la logique de la guerre. Il a fallu attendre le 9 mai 1950 au Quai d’Orsay, à Paris, pour que Robert Schuman, Ministre français des Affaires étrangères, proclamât la première esquisse de ce qu’est devenue l’actuelle Union Européenne. Un rêve imaginé par Victor Hugo il y a près de cent soixante-dix ans.
Metternich avait placé le Congrès de Vienne sous le signe de l’ordre : « Le mot « liberté » ne signifie pas pour moi un point de départ, mais un vrai point d’arrivée. Le point de départ est défini par le mot « ordre ». La liberté ne peut exister sans le concept d’ordre. ».
Tandis que Robert Schuman avait placé le futur Traité de Rome sous le signe de la paix : « L’Europe n’a pas été faite, nous avons eu la guerre (…). La solidarité de production qui sera ainsi nouée manifestera que toute guerre entre la France et l’Allemagne devient non seulement impensable, mais matériellement impossible (…). Ainsi sera réalisée simplement et rapidement la fusion d’intérêts indispensable à l’établissement d’une communauté économique qui introduit le ferment d’une communauté plus large et plus profonde entre des pays longtemps opposés par des divisions sanglantes. » (9 mai 1950).
C’est cette idée qu’il ne faut pas oublier, comme il faut se rappeler l’histoire des peuples européens depuis deux siècles, pour comprendre que dans tous les cas, quels que soient les soubresauts des crises économiques ou financières, il est nécessaire de préserver la construction européenne pour préserver tout simplement la paix. Ce n’est pas parce que la plupart des citoyens n’ont jamais connu la guerre, c’est heureux et ce n’est pas un hasard, qu’ils doivent oublier que la guerre a été dans la matrice génétique du continent européen depuis deux ou trois millénaires et que rien n’est jamais acquis.