Grèce: il faut licencier Christine Lagarde !

Il faut licencier Christine Lagarde, la directrice générale du Fonds monétaire international (FMI). Ses exigences de nouvelles et sévères coupes budgétaires sont politiquement inacceptables pour la Grèce, ce qui rend de plus en plus probables un échec des négociations en cours et un défaut de paiement à la fin du mois ou dans les semaines qui suivent (il y a toujours des moyens techniques de retarder l’échéance).

Ce n’est pas pour rien qu’en 2010, Jean-Claude Trichet, alors président de la Banque centrale européenne (BCE), avait bataillé contre la présence du FMI dans le sauvetage des pays attaqués par les marchés : pour lui, la zone euro avait les moyens de s’occuper seule de ses canards boiteux, ce qui lui éviterait de se voir imposer un agenda décidé ailleurs. Les faits lui donnent raison : il est désormais clair que la logique de l’organisation de Washington est incompatible avec celle de la zone euro.

Le FMI obéit à des considérations uniquement budgétaires : lorsqu’il intervient, il conditionne ses prêts à un équilibre du budget (coupe dans les dépenses, augmentation des impôts) et impose un abandon de dette afin de la rendre soutenable. Or, si la dette grecque a été en partie restructurée, pour un montant de 115 milliards d’euros, cela a été fait très tardivement, en 2012, et les 220 milliards de prêts accordés par la zone euro n’ont pas été concernés. Surtout, le FMI ne se préoccupe guère du maintien de la Grèce dans l’euro, pas plus que la pérennité du projet européen : ce sont des questions politiques qui lui sont étrangères.

Pour la zone euro, c’est l’inverse : sa priorité est politique, éviter un « Grexit » qui menacerait la pérennité de la monnaie unique. Mais elle continue à faire mine de croire que la Grèce pourra rembourser ses dettes à partir de 2023 (rien n’est exigible avant), alors qu’elle sait bien que ce ne sera jamais le cas. Le fait que le FMI et la zone euro négocient ensemble pousse chacun à l’intransigeance et aboutit à exiger d’Athènes l’impossible : des coupes budgétaires visant non seulement à l’équilibre, mais à un excédent primaire irréaliste censé permettre le remboursement d’une dette « sanctuarisée ». Deux logiques inconciliables qui menacent toute l’Europe d’une catastrophe sans précédent.

N.B.: éditorial paru dans Libération du 16 juin

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