Vous entendez parler en ce moment dans les médias de « Droit de Vote Double » et vous demandez peut être de quoi il s’agit et comment ça impacte notre économie.Vous savez sans doute que toute société est constitué à l’origine avec les versements d’argent de différents actionnaires pour en constituer le capital qui est le pécule indispensable pour pouvoir assurer les dépenses de la société le temps que commencent à rentrer les premières commandes puis les premiers paiements. Le capital est subdivisé en actions et est une dette de la société envers les actionnaires. Il est d’ailleurs inscrit comme tel dans le bilan de la société, au passif.Il est rémunéré par le dividende et donne droit d’assister à l’Assemblée Générale et de voter les résolutions qui y seront présentées.
Le principe de fonctionnement des droits de votes attachés à une action est en général celui du« Une action=Un vote » . il existe cependant, pour des raisons historiques, dans les statuts de nombreuses sociétés ( les deux tiers de celles du CAC 40!) des actions à droit de vote double dont le but était soit de protéger les actionnaires fondateurs, soit de constituer un noyau dur d’actionnaires stables en récompensant ainsi leur fidélité ou encore d’éviter les changements d’objet de la société ou ceux de de sa stratégie de développement.Des raisons de bon sens pour assurer le développement harmonieux d’une société mais qui peuvent avoir également des effets pervers.
L’actualité nous en offre un exemple en ce moment avec le rachat par St Gobain des actions de la famille fondatrice de la société suisse Sika , crée en 1910 par la famille Burkard-Schenker et dont la holding détenait 16 pct du capital. Mais des actions auxquelles étaient rattachés des droits de votes multiples qui leurs permettaient d’arriver à 52 pct des droits de vôtes.En rachetant ainsi à la famille fondatrice ses 16pct du capital, St Gobain devenait majoritaire dans Sika.Les autres actionnaires de toute évidence ne vont pas se laisser faire aussi facilement.
En France, l’arrêt prévu des hauts fourneaux de l’usine de Florange d’ArcelorMittal avait suscité une furieuse bataille entre les actionnaires majoritaires, la famille Mittal, et le Ministre de l’Economie de l’époque, Arnaud Montebourg, qui voulait maintenir les équipements de la société à l’identique pour ne pas toucher aux effectifs. L’Etat par manque de moyens financiers n’ayant pu nationaliser la société, les hauts fourneaux furent finalement fermés mais Montebourg pour éviter que l’Etat ne reste impuissant devant des cas similaires fit voter en mars 2014 la loi dite Florange qui devait« viser à reconquérir l’économie réelle ». Et pour celà, elle généralisait le vôte double pour tout actionnaire de long terme ,c’est à dire ayant conservé ses actions plus de 2 ans
En principe, ce sont les statuts des sociétés qui fixent les droits à vote double. Il fut accordé la possibilité que les sociétés puissent refuser le vote double à condition qu’une résolution le refusant soit présentée en Assemblée Générale et votée avec plus des deux tiers des voix. Or, comme tout copropriétaire a pu le constater dans l’Assemblée générale de sa copropriété, il est quasiment impossible de gagner un vote soumis à la règle des majorités des 2/3 des votants!
Vous assistez donc en ce moment pour les Assemblées Générales devant se dérouler d’içi l’été à la prolifération de résolution refusant les droits de vôtes doubles. Tous les investisseurs institutionnels ou les fonds d’investissements de toute nationalité qui ont investi dans nos entreprises sont furieux de risquer de se voir dépouiller d’une partie de leur pouvoir décisionnaire au profit de l’Etat français ou d’un actionnaire important mais non majoritaire ( Cas de Vincent Bolloré chez Vivendi).
Chacun étudie en ce moment les recours juridiques possibles contre la loi Florange/Montebourg mais sans grand espoir.Ils peuvent revendre leurs actions mais ça risque de provoquer une certaine panique pour telle ou telle société et donc une baisse des cours et de la valeur de leurs actifs. Ils peuvent aussi demander je suppose à ce que le siège des sociétés concernées soient transférées en dehors de France, Pays Bas, Luxembourg ou Suisse,
Quant à investir en France dans nos sociétés, ça risque de devenir difficile. Je vous invite à suivre de prés les développements juridiques de cette affaire….